Sans aller jusqu’à leur prêter une âme, les outils anciens sont les témoins d’une époque et du travail de l’homme. Apprenez à les connaître, respectez-les et sauvez-les ! Et pour les appréhender encore mieux, utilisez-les.
Le “Guide des outils et objets domestiques” d’André Mercuzot (éditions Jean-Cyrille Godefroy) pour rentrer plus en détail dans les méthodes de restauration.
“Les outils taillants” de Daniel Boucard (publié chez le même éditeur) vous permettra d’identifier de nombreux outils.
Ce même éditeur réédite le “Catalogue des outils Goldenberg” de 1927, une mine d’informations.
Enfin, pour le plaisir des yeux, “Les outils du bois” de Chantal et Jacques Bona (éditions La Maison Rustique).
Ils font souvent envie, ces vieux outils du travail du bois dénichés dans les brocantes. Ou quelquefois pitié, tant ils ont été maltraités. Regardez-les de plus près : il faut parfois peu de chose pour les remettre en état, voire leur redonner vie en découvrant à nouveau le travail manuel. Avec de beaux copeaux à la place de la poussière, et en silence. Essayez, c’est un plaisir !
Règle de principe en brocante, ne vous précipitez pas : les pièces rares suivent en général d’autres circuits.
Si vous débutez, prenez le temps d’apprendre, de regarder et de comparer. L’état des outils varie, les écarts de prix sont parfois ahurissants. On vous demandera 15 € pour un rabot ordinaire complètement vermoulu et rouillé, quand vous trouveriez pour moitié moins un bouvet n’exigeant qu’un décrassage. Et ne prenez pas des vessies pour des lanternes : nombre de rabots en bois sont assez récents.
L’idéal serait de démonter l’outil pour traiter séparément chaque partie. Mais cela n’est pas toujours possible, soit parce que les pièces sont solidaires (clouage, rivetage, etc.), soit parce que l’opération risque de faire plus de dégâts que de bénéfices.
Attention, en particulier, aux têtes de vis. Chauffez-les au fer à souder pour les aider à sortir. N’hésitez pas à retailler un tournevis, voire un ciseau bas de gamme, pour obtenir un outil parfaitement adapté.
Nettoyez-le avec un décrassant pour meubles, passé à la mèche de coton ou à la laine d’acier 000 si l’outil est très sale. Ne cassez pas les arêtes vives et n’effacez pas les éventuelles marques de l’ancien propriétaire.
Inspectez soigneusement l’outil. Traitez les trous de vers isolés par injection, avec un aérosol muni d’un tuyau et d’une aiguille, ou avec une seringue. Si l’attaque est plus importante, laissez tremper la pièce de 24 à 48 heures dans un bain de traitement insecticide. N’utilisez une résine insecticide liquide (Liberon, les Frères Nordin…) que si l’outil est franchement vermoulu. En effet, le produit change l’aspect de la surface. Après séchage, vous pouvez colmater les trous à la cire à reboucher, mais cela n’a rien d’obligatoire.
Encaustiquez enfin l’outil ou passez-le à l’huile de lin chaude additionnée de 50 % de térébenthine et d’un peu de siccatif. Cette seconde finition, plus durable, est plus contraignante à appliquer et fonce le bois.
N’employez pas d’abrasifs trop agressifs pour ne pas retirer de métal sain, ni donner à l’outil l’aspect du neuf. Méfiez-vous des brosses dures. Elles lustrent la rouille au lieu de l’enlever. Un couteau ou un affiloir très affûté sont parfois nécessaires pour retirer les reliefs récalcitrants de métal oxydé.
Les destructeurs de rouille chimiques du commerce sont pratiques, mais plus onéreux que les classiques acides chlorhydrique (neutralisé ensuite à la soude) et phosphorique (qui reste cher). Utilisez les acides en plein air : dans l’atelier, leurs vapeurs feraient rouiller vos autres outils. La technique de l’électrolyse, méconnue, est très efficace et assez simple à mettre en œuvre.
Décapez les éléments en laiton en les plongeant dans du vinaigre blanc bouillant additionné de deux grosses cuillerées de sel par litre. Polissez-les ensuite avec un produit ménager (type “Miror”), qui fera disparaître les éventuelles traces roses laissées par le décapage. Le fer et l’acier doivent être protégés immédiatement après traitement : ils se réoxyderaient en quelques jours, voire en quelques heures.
La remise en service de l’outil peut exiger d’en refaire certaines parties. Attention, toute modification irréversible est à exclure sur une pièce de collection ! La pose d’un insert pour refermer la lumière d’un rabot usé était une opération courante, que rien n’interdit de reproduire. Refaire un coin ou un manche – dans le respect du style de l’outil – est anodin. Lors du nettoyage d’un rabot, soignez particulièrement la trémie (puits de passage creusé dans le corps de l’outil) pour que le fer soit bien maintenu.
Avant d’envisager l’utilisation d’un outil tranchant, inspectez-le. Un dos de fer piqué n’est pas grave. Mais si le dérouillage a laissé des trous sur sa planche, l’affûtage laissera des dents dans le tranchant. Remplacer un fer égaré par la retaille d’un autre de même largeur est aisé. De plus amples opérations supposent au minimum de maîtriser les opérations de détrempe, de retrempe et de revenu.
Méfiez-vous des gouges et des ciseaux : la soie peut être complètement rouillée dans le manche, sans que cela se voie. D’où un risque de rupture à l’utilisation. S’il est souvent possible de reprendre la denture d’une scie, n’espérez pas l’utiliser si les côtés de la lame sont trop marqués, elle ne glisserait pas.
Jamais au grand jamais de ponçage, ni de décapage sur le bois : vous perdriez la patine de l’outil. Utilisez un décrassant d’antiquaire. Frottez au chiffon ou, si cela ne suffit pas, à la laine d’acier 000.
Inspectez votre outil.
Au moindre trou suspect, il faut traiter. Ponctuellement avec un aérosol muni d’un tube fin ou par imprégnation dans un bain insecticide si les trous sont nombreux.
Pas de vernis sur un rabot et a fortiori sur sa semelle. Traitez à l’huile de lin chaude coupée à 50 % de térébenthine et additionnée de siccatif. Ou passez simplement de l’encaustique pour meuble.
Après 5 mn dans l’acide chlorhydrique, rincez le fer à l’eau avec une brosse douce. Neutralisez par un bain d’une demi-heure dans de l’eau très chaude additionnée d’1,5 % de lessive de soude.
L’électrolyse est réalisable à la maison. Il suffit d’une solution conductrice (eau + cristaux de soude ou bicarbonate de soude), d’un récipient adapté, d’un morceau d’inox et d’un chargeur de batterie.
L’oxydation des lames de scie ou d’équerre peut dissimuler des gravures. Alternez bains de dégrippant et brossages à la laine d’acier extra-fine. Soyez patient et délicat pour ne pas les détruire à jamais.
Les brosses synthétiques sont une invention merveilleuse pour dérouiller. Portez un masque afin de ne pas respirer la poussière. Utilisez les brosses bleues, voire rouges, en cas d’oxydation importante.
Pour éliminer les résidus du traitement des métaux, comme pour décrasser directement ceux-ci, vous serez amené à frotter. Utilisez toujours des brosses les plus douces possibles pour limiter les rayures.
Résultat de différents traitements sur des fers de bouvet rouillés. De gauche à droite : décapage (volontairement trop) agressif à la brosse en Nylon, à l’acide chlorhydrique, à l’électrolyse et état initial.
Protégez le métal en l’enduisant d’huile de lin ou de paraffine, ou simplement d’encaustique, qui l’isoleront de l’air ambiant. Le “WD 40” est très efficace, mais peut abîmer certaines peintures.
Les métaux non ferreux peuvent être ravivés avec des produits ménagers, tels que le célèbre “Miror”, ou pour voitures. Testez d’abord le moins agressif et ne passez à plus fort que si c’est nécessaire.
Le fer de gauche n’est pas réutilisable : la rouille – profonde – forme même des plaques. L’oxydation du fer de droite – superficielle – est facile à éliminer. La planche peut être polie, l’outil pourra resservir.
Pour retailler un coin égaré (ou refait en bois blanc), utilisez une essence proche de celle du rabot et prenez un modèle. Si l’outil est rustique, travaillez à la main pour lui garder son caractère.
Poser un insert pour refermer la lumière d’un rabot usé était une pratique courante, qu’on peut reproduire sur un outil de faible valeur. Dressez ensuite la semelle au papier abrasif sur une surface plane.
Pour refaire un fer de moulure, enduisez de blanc correcteur l’extrémité d’un fer “orphelin” de même largeur et placez-le dans le rabot pour y reporter la forme. Retaillez à la meule, sans détremper.
