Mon jardin est envahi de pucerons, comment s’en débarrasser ?
Se nourrissant de la sève des végétaux qu’ils colonisent en formant des chapelets sur les jeunes pousses, les pucerons sont des insectes piqueurs-suceurs (ordre des Hémiptères). On compte une cinquantaine d’espèces nuisibles aux plantes qui attaquent une large palette de cultures ornementales, potagères et fruitières. Les pucerons ravageurs montrent une prédilection pour les : artichaut, capucine, cerisier, chicorée, dahlia, érable, fève, fuchsia, groseillier, haricot, laitue, pêcher, peuplier, prunier, pommier, rosier, seringat, spirée, viorne.
Mesurant entre 1 et 4 mm de long en moyenne, les pucerons sont munis d’un rostre avec lequel ils percent la cuticule (peau) de la plante et dont ils se servent comme pompe pour absorber la sève. La plupart des pucerons adultes ne possèdent pas d’ailes (aptères) et se multiplient par parthénogénèse (sans accouplement). Les sujets ailés, mâles ou femelles, sont appelés des « fondateurs » car ils se reproduisent par voie sexuée et assurent la dissémination des colonies.
Par leurs piqûres nombreuses et répétées, les pucerons provoquent des réactions chez les plantes attaquées, dont les tiges et les feuilles se déforment et se crispent. En prélevant de la sève, les pucerons entravent sa circulation et les organes végétaux sont moins irrigués, ce qui conduit à un développement chétif.
Par ailleurs, nombre d’espèces de pucerons constituent des vecteurs de maladies à virus, notamment la Sharka, maladie virale spécifique des arbres fruitiers à noyaux, transmise par le puceron vert du prunier (Brachycaudus helichrysi).
• Tout savoir : le phylloxéra (Daktulosphaira vitifoliae), qui a failli détruire la quasi-totalité du vignoble français au dix-neuvième siècle, est aussi un puceron. Il attaque les racines et forme des galles sur les feuilles. Les plants attaqués meurent dans les trois ans.
Les pucerons constituent une source de nourriture pour de nombreux hôtes du jardin, à commencer par les oiseaux insectivores (mésanges, rouge-gorge, fauvette, moineau friquet, troglodyte mignon…) mais également les coccinelles et d’autres insectes prédateurs tels les larves de syrphes (diptère) et de chrysopes (névroptères). Lorsque l’équilibre biologique est obtenu dans le jardin, la quantité de pucerons présente sur chaque plante se limite à un seuil tolérable et les dégâts sont insignifiants.
N’amendez pas trop votre sol en matière organique et limitez les engrais azotés car ils favorisent le développement de pousses aux tissus très tendres, très attractives pour les pucerons.
Posez des bandes de glu autour du tronc des arbres ou badigeonnez-en le pied des arbustes afin d’empêcher les fourmis (surtout Lasius niger) de transporter les pucerons sur les jeunes pousses. Les formicidés pratiquent en effet « l’élevage » de pucerons dont elles consomment le miellat.
La palpation par les antennes des fourmis du des pucerons provoque la sécrétion du miellat qui constitue pour ces hyménoptères sociaux un complément alimentaire riche en sucre.
Dès l’apparition des premiers chapelets de pucerons, vous pouvez couper les pousses infestées et les brûler. C’est une technique de contrôle des populations vraiment efficace, à recommander surtout sur les cerisiers et les groseilliers dont les feuilles attaquées se crispent, constituant des protections (sortes de parapluies) sous lesquelles les pucerons se trouvent protégés des insecticides « bio » qui n’agissent que par contact.
La tendance du moment étant de laisser supposer que « la nature fait toujours bien les choses », on peut être tenté de ne pas intervenir en cas d’attaque des plantes du jardin par les pucerons. Après tout, les auxiliaires (voir plus loin dans le texte) pourraient faire le travail à notre place. En réalité une lutte efficace passe par la mise en œuvre de l’ensemble des dispositifs possibles car le potentiel reproducteur des pucerons est colossal, jusqu’à vingt générations pouvant se succéder dans l’année.
Lorsque les conditions climatiques sont favorables (chaleur et humidité), la démographie galopante des aphidiens dépasse très largement les capacités régulatrices de leurs prédateurs naturels. Il faut savoir aussi que les pucerons sont actifs dès que la température ambiante dépasse 5 °C, tandis que les coccinelles et autres auxiliaires ne se mettent en chasse qu’à partir de 10 à 15 °C.
Comme l’emploi des insecticides de synthèse sera interdit dans les jardins d’amateurs dès janvier 2019, autant prendre les devants sur la législation et utiliser des insecticides d’origine végétale. Les produits formulés à base d’huile de colza sont utilisables en agriculture biologique et s’emploient sur quasiment toutes les plantes : arbres et arbustes fruitiers, légumes, rosiers, fleurs, arbres et arbustes d’ornement, qu’ils soient cultivés en pleine terre ou en pots (voir plus loin la liste des espèces sensibles à ne pas traiter).
Le large spectre d’action des insecticides à base d’huile de colza assure une efficacité sur un grand nombre d’insectes, dont les cochenilles, à tous les stades d’évolution : œufs, larves et adultes, mais aussi sur les acariens (araignées rouges). La quasi innocuité du produit permet de traiter jusqu’à seulement deux jours avant la récolte. Ces produits ne sont pas classés comme dangereux conformément au règlement (CE) n° 1272/2008 et ses modifications (aucun effet important ou danger critique connu), à la fois sur l’homme, les animaux à sang chaud et les espèces aquatiques.
Les insecticides à base d’huile de colza sont efficaces toute l’année, toutefois ils ne s’utilisent pas par temps de gel. Après deux applications seulement, on observe une réduction significative du nombre de pucerons sur les cultures traitées. En cas de forte infestation, renouvelez le traitement une à deux semaines plus tard.
Pour les petits jardins ou les balcons, optez de préférence pour un traitement pucerons. Présenté en vaporisateur, il ne nécessite ni préparation, ni dosage.
• Attention : l’utilisation des produits à base d’huile de colza est déconseillée dans la maison car ils tachent les meubles. Sortez sur la fenêtre ou le balcon les plantes d’intérieur nécessitant un traitement.
Agitez énergiquement le produit avant l’emploi. Pulvérisez en prenant soin de bien mouiller l’ensemble des feuilles, des tiges et le tronc, sans aller jusqu’au ruissellement (excepté sur les pucerons lanigères du pommier). La dose d’emploi homologuée est de 1 l pour 10 mètres carrés. En cas de forte infestation, renouvelez le traitement après 7 à 14 jours. Ne dépassez pas trois applications par an.
Traitez uniquement par temps calme et doux (maximum 25 °C), lorsque les plantes ne sont pas exposées en plein soleil et bien sûr jamais en présence d’abeilles et autres pollinisateurs.
Arrosez généreusement les plantes avant de les traiter, pour que leurs feuilles supportent bien la pellicule huileuse, il ne faut pas qu’elles aient été stressées par la sécheresse. Un ombrage des plantes après traitement étant conseillé, pour les sujets en pleine terre, opérez de préférence en fin de journée.
Après application d’un insecticide contenant de l’huile de colza, attendez 10 jours avant de traiter avec un fongicide à base de soufre ou de cuivre (bouillie bordelaise).
Les plantes à ne pas traiter : certaines espèces supportent mal le contact avec les produits huileux, il ne faut donc pas pulvériser sur elles d’anti-pucerons à base d’huile de colza. C’est le cas des : arum (Zantedeschia), bégonias, cactées, caladium, coléus (Solenostemon), datura en arbre (Brugmansia), chrysanthèmes, conifères bleus, cyclamen, fougères, gloxinia (Sinningia), lierre, kalanchoe, misère (Tradescantia), orchidées (Cattleya, Cymbidium, Dendrobium, Oncidium, Paphiopedlium, Phalaenopsis, Vanda…), phalangère (Chlorophytum), piment et poivron, plante aux éphélides (Hypoestes), plantes carnivores (Dionaea, Drosera, Nepenthes, Sarracenia…), poinsettia (Euphorbia pulcherrima), primevère, violette du Cap (Saintpaulia), Schefflera, Streptocarpus, vesce (Vicia sativa), etc.
Parmi les très nombreux prédateurs naturels que comptent les pucerons, les coccinelles (il en existe 80 espèces en France) s’imposent à l’image des jardiniers en tant que toute première arme pour la lutte biologique. On utilise couramment la coccinelle à deux points (Adalia bipunctata) comme auxiliaire car c’est la plus vorace de nos espèces indigènes. Elle consomme de 30 à 40 pucerons par jour et ses larves (appelées triongulins) entre 12 et 50. Sachant qu’une femelle Adalia pond entre 20 et 50 œufs par jour, elle représente un fort potentiel de réduction des populations de pucerons.
On peut acheter des coccinelles sur Internet, qui vous sont livrées directement par colis express (il n’est pas possible pour les jardineries de stocker des auxiliaires biologiques vivants). Il suffit d’accrocher sur les plantes infestées un ou plusieurs sachets (un seul par rosier ou arbuste) contenant 15 coccinelles adultes.
• Attention : n’utilisez pas les coccinelles pour lutter contre le puceron cendré du chou (Brevicoryne brassicae) car cette espèce sécrète certaines substances (protéines et enzymes) qui synthétisent une toxine mortelle pour les triongulins.
Toujours dans un esprit de jardinage raisonné, vous pouvez, à la maison, sur le balcon ou en serre, piéger les pucerons ailés, ainsi que les aleurodes ou « mouches blanches », qui sont des insectes très voisins des pucerons, en disposant des pièges près des plantes en pots. Il s’agit de plaques de couleur jaune résistantes à l’eau et recouvertes de glu recto et verso.
Le jaune vif attire irrésistiblement ces insectes (mais aussi les mouches mineuses, les thrips et les cicadelles). Les pièges, accrochés sur la tige support qui est fournie avec, sont plantés directement dans les pots ou les jardinières. Ils doivent être renouvelés toutes les 6 à 8 semaines ou dès qu’ils sont couverts d’insectes.
Pour une efficacité maximale, installez les pièges jaunes dès le début de la culture, avant l’arrivée des ravageurs.