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Architecture : assembler les pierres

Avec des cailloux ramassés çà et là, les hommes ont aménagé leur espace. Du Jura à la Provence en passant par le Languedoc et l’Auvergne, découvrons l’étonnante diversité de cette architecture minérale.

Architecture : assembler les pierres

Une pratique ancienne

Ce matériau ne coûte que la peine de le ramasser et la patience de l’assembler. Des générations de paysans ont ainsi façonné leur milieu naturel : cultures en terrasses des Cévennes, bergeries du Luberon, citernes et chemins de transhumance… Loin de l’image réductrice du berger « empilant des cailloux » pour se faire un abri, cette pratique de la pierre sèche est l’expression d’une civilisation agropastorale millénaire !

Rendre l’espace productif

L’origine de cette architecture paysanne long­temps sous-estimée est liée à la géologie : là où la roche abonde sous forme de blocs, plaques, moellons (granite, gneiss, trachyte…) ; là où elle affleure le sol et se délite sous l’action du gel en feuillets plus ou moins épais (calcaire, schiste…). Les régions pierreuses sont dispersées sur une large partie du territoire : Aquitaine, Auvergne, Bourgogne, Bretagne, Franche-Comté, Languedoc, Midi-Pyrénées, Provence…

Rendre l’espace productif nécessitait d’épierrer le sol avant de le mettre en culture. Au lieu d’amonceler sans but, l’agriculteur choisit d’exploiter cette récolte pour édifier à moindre coût, enclos, murets, cabanes et terrasses…

Stopper l’érosion

Circonscrite à la seule pierre, sans aucun liant, cette architecture n’en offre pas moins une grande diversité d’ouvrages et de formes. Striant les versants des vallées, les terrasses se rencontrent dans les régions semi-montagneuses du Massif central (Ardèche, Haute-Loire, Gard, Lozère…), et des Alpes (Alpes-de-Haute-Provence, Vaucluse, Var…). Une riche terminologie les désigne : restanques de Provence, planches du pays niçois, bancels ou faïsses des Cévennes…


Aménagées principalement aux XVIIIe et XIXe siècles, elles avaient pour but de retenir la terre arable (rare et précieuse dans ces territoires accidentés) pour y implanter les cultures nécessaires à une vie autarcique : potagers, vignobles, oliveraies, vergers, champs de céréales, ruchers…


Pour protéger les parcelles d’une érosion aggravée par les pluies torrentielles, il a fallu border les parties planes d’épais murs inclinés vers l’arrière capable de contenir les éboulements. L’entretien des « escaliers de géants » était considérable. L’hiver servait à consolider ou refaire les portions écroulées.

Une seconde maison

Emblème de la construction en pierres sèches, la cabane compte bien des appellations : cabanon pointu ou borie en Provence, capitelle dans le Gard, l’Ardèche et le Languedoc, cadole en Saône-et-Loire, cabotte du Dijonnais, barracou du Larzac, caselle ou gariote dans le Quercy,  tonnet et case dans le Cantal et en Haute-Loire…


Reflet d’une agriculture extensive et du nomadisme pastoral, la cabane constitue une annexe de la maison. Abri de berger, remise à outils, loge de forestiers, poste de guet, abri-citerne, poste de vinification, four à genièvre… Ses fonctions étaient multiples, presque toujours temporaires et liées à un usage agricole.


De plan carré, rectangulaire, rond ou ovale, elles sont couronnées de coupoles en forme de dômes, de sphères, d’ovale, de pyramide ou de cylindre…

Maîtriser l’eau

Plus rares, les bergeries (Provence et Corse) sont des constructions destinées à loger le berger et ses bêtes durant l’estive. Les plus spectaculaires présentent une nef à trois, quatre ou cinq travées coiffée de coupoles en encorbellement. Certaines sont entourées d’enclos aux murs parfois couronnés d’un « pare-loup » : on y voit de longs moellons terminés par une pointe dirigée vers l’extérieur.


Typiques du Luberon aux précipitations faibles et irrégulières, les aiguiers sont des citernes destinées à recueillir l’eau de pluie avant que le calcaire ne l’absorbe. Creusés dans la roche, les bassins sont le plus souvent couverts d’une coupole en encorbellement proche de celles des cabanes. À la différence que les pierres, montées à la manière d’un escalier inversé, ne sont pas inclinées vers l’extérieur mais vers l’intérieur pour y rabattre l’eau.

Les terrasses

Architecture : assembler les pierres

Pour protéger les terres des pluies torrentielles, les paysans cévenols ont aménagé en terrasses les versants des vallées. Les pentes en prennent un aspect « escalier de géants » (Saint-Martial, Gard).

Des édifices entiers

Architecture : assembler les pierres

Sur la commune de Saint-André-d’Allas (Dordogne), les cabanes du Breuil regroupent deux édifices de plan circulaire. La toi­ture qui les réunit est couverte de lauzes de calcaire.

Un enclos à moutons

Architecture : assembler les pierres

Un enclos à moutons en Lozère. Le mur est formé d’un double parement aux pierres légèrement inclinées vers l’intérieur pour s’épauler. Des dalles posées sur chant stabilisent et protègent la construction.

Bergeries

Architecture : assembler les pierres

Dans la montagne de Lure, le jas des Terres du Roux est une bergerie inscrite à l’inventaire des Monuments historiques. Elle se compose d’une cabane et d’une bergerie encloses par un mur.

Coupoles et citernes

Architecture : assembler les pierres

 En fines plaques de calcaire, sa nef à quatre travées est couronnée d’autant de coupoles dressées à la manière d’un « escalier inversé ». Une citerne y recueille l’eau de pluie.

Abris divers

Architecture : assembler les pierres

Bâties durant la morte saison, ces cabanes servaient d’abri pour les bergers, les vignerons et les forestiers, et également de remise à outils ou de poste de guet.


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