Le greffage est actuellement la seule technique de reproduction du rosier utilisée par les professionnels, en raison de sa fiabilité. En effet, les roses obtenues sont strictement conformes à celles de l’arbuste sur lequel a été prélevé le greffon. Il ne faut pas cacher que le greffage reste une technique délicate et sa réussite est loin d’être garantie pour qui manque de pratique.
Principe du greffage
Le greffage consiste à unir deux végétaux, pour multiplier l’un d’entre eux en reproduisant ses caractères propres (qualité des fleurs ou des fruits, par exemple), en bénéficiant de la vigueur de l’autre. Pour que le greffage soit possible, il faut donc une bonne affinité entre les deux sujets (on parle de greffon et de porte-greffe), seule capable d’assurer la soudure des tissus végétaux mis en contact.
Cette technique de multiplication est très spectaculaire : il est toujours étonnant, par exemple, de voir se développer de magnifiques fleurs solitaires sur un modeste petit rosier botanique, voire sur un églantier sauvage.
Précisons, au passage, que cette technique permet la reproduction fidèle de toutes les grandes variétés de rosiers produites par des obtenteurs patentés. Les rosiers que vous avez pu acquérir chez certains d’entre eux résultent de longues recherches, représentant pour les professionnels un véritable investissement. Les grandes variétés, déposées au même titre que les brevets industriels, font donc l’objet d’une protection légale signifiée par une marque (R, dans un cercle, de l’anglais registered : enregistré). La reproduction à des fins de commercialisation est donc strictement interdite.
Greffer les rosiers contemporains
Le greffage s’avère particulièrement intéressant dans le cas de plantes telles que les rosiers contemporains : résultant de nombreuses hybridations artificielles, ils ne peuvent se reproduire fidèlement par semis. Une fois l’hybride souhaité obtenu, il importe donc de le reproduire par greffage, ce qui permet de le fixer définitivement.
La réussite du greffage dépend du degré d’affinité des plantes greffées, du niveau de végétation des sujets, de l’habileté du jardinier et du soin apporté à la plante après le greffage.
Le porte-greffe
L’affinité entre porte-greffe et greffon, on l’a vu, reste l’une des conditions essentielles à la réussite du greffage. Le cas des rosiers est spécifique puisqu’il s’agit ni plus ni moins de greffer un rosier sur un autre rosier, alors qu’avec d’autres plantes on associe souvent des espèces proches mais assez différentes (érable et platane par exemple).
Le greffage n’ayant ici d’autre but que de fixer l’hybride obtenu, la greffe se fait donc sur ce qu’on peut appeler un rosier “primaire”, poussant ou ayant poussé à l’état spontané : il peut s’agir de Rosa multiflora ou de Rosa canina, plus connu sous le nom d’églantier.
Si vous vous trouvez à la campagne, vous n’aurez aucune peine à vous procurer un églantier sauvage dans les haies bordant les chemins ou séparant les champs du bocage. Avec l’autorisation du propriétaire, prélevez avec une bêche l’un de ces églantiers, souvent très volubiles, et replantez-le dans un coin du jardin. Il permet de prélever chaque année autant de boutures que nécessaire pour constituer des porte-greffe bien droits.
Si vous êtes patient, rien ne vous empêche de laisser venir à maturité vos rosiers ou de récolter des cynorhodons sauvages pour procéder à un semis. Les sujets ainsi obtenus constituent eux aussi d’excellents porte-greffe.
Le jardinier astucieux peut profiter de l’apparition d’un drageon sur une racine de rosier tige pour prélever un porte-greffe rapidement opérationnel… Mais le jardinier sérieux, pour ne pas dire professionnel, commande tout simplement des plants de Rosa canina ou de Rosa multiflora, qui émettront spontanément de nombreux drageons constituant les meilleurs des porte-greffe.
Le greffon
Le greffon est la
partie aérienne prélevée sur la plante dont on veut reproduire les qualités, et qui, pour ce faire, est associée au porte-greffe. Les différents types de greffes correspondent chacun à une technique particulière d’association des tissus végétaux.
Pour le rosier, il faut utiliser comme greffon, l’œil, c’est-à-dire le minuscule bourgeon visible sur la tige, à partir duquel se développe ensuite un nouveau rameau. Son prélèvement permet d’obtenir une sorte d’écusson, d’où son nom, la technique de greffage utilisée s’appelant
“écussonnage”.
- Pour prélever l’écusson, utiliser un greffoir, et non un couteau comme cela se fait trop souvent. Cet outil, appelé aussi écussonnoir, se compose d’une lame courte, très tranchante, et d’une spatule permettant de soulever l’écorce sans blesser le bois (opération impossible à effectuer avec la lame d’un couteau).
- Pour prélever un écusson, couper au préalable le ou les rameaux sur lesquels seront pris les écussons.
- Pour plus de commodité, ôter les aiguillons et effeuiller les tiges.
- Pratiquer une incision transversale au rameau, un à deux centimètres au-dessus de l’œil.
- Amorcer l’entaille un à deux centimètres en dessous de l’œil, en procédant comme pour “éplucher” l’écorce du rosier.
- Rejoindre ainsi l’incision transversale pratiquée plus haut ; faire une entaille franche.
- Éviter d’attaquer le bois : l’écusson doit se composer exclusivement de l’écorce, du point végétatif constituant la partie interne de l’œil et du pétiole placé juste en dessous du minuscule bourgeon.
- S’il reste un petit fragment de bois, le gratter doucement, en prenant bien soin de ne pas vider l’œil.
- Pour préparer l'écussonnage, inciser sous la greffe en T avec la lame du greffoir.
- L'entaille ne doit pas entamer le bois du rosier.
- A l'aide de la spatule du greffoir, soulever les lèvres de l'entaille et placer l'écusson.
- Une ligature professionnelle est en tissu ; mais l'amateur utilisera plutôt du raphia.
- Dès reprise de l'oeil, couper juste au-dessous de l'ancienne greffe.
- Au bout de quelques semaines, le nouveau rosier se développe.
L’écussonnage
- Il consiste en la mise en contact des tissus végétaux du porte-greffe situé en dessous de l’écorce, et de ceux de l’écusson sous-jacent à l’œil qui permet la doublure des deux sujets ; le porte-greffe alimente désormais en sève le greffon qui peut ainsi se développer.
- Riches en cambium, ces cellules ne tardent pas à se souder.
- Une fois l’écusson prélevé, il faut inciser l’écorce du porte-greffe. Pour un rosier buisson, il faut opérer aussi près que possible du collet. Pour un rosier tige, la greffe se pratique à la hauteur désirée, sur un rameau bien droit du porte-greffe. L’écorce du porte-greffe doit être incisée en T, avec la lame du greffoir.
- Soulever ensuite les lèvres de l’écorce à l’aide de la spatule du greffoir, en veillant à ne pas blesser le bois du porte-greffe. En effet, la moindre éraflure peut compromettre l’union des tissus végétaux.
- Introduir l’écusson dans l’entaille qui vient d’être pratiquée.
- Le glisser de haut en bas et enfoncer profondément, sans pour autant ouvrir davantage l’incision.
- S'assurer que les tissus se trouvent bien en contact, puis ligaturer la greffe avec du raphia ou, à défaut, un fil de laine.
- Ne surtout pas enduire le raphia ou la laine de mastic de greffage ni de cicatrisant en bombe : la greffe en écusson, à la différence de certaines autres, ne s’englue jamais.
- Une greffe réussie reprend très vite. Si, au bout d’une quinzaine de jours, l’œil reste vert, cela signifie généralement que la greffe a repris.
- Le fait que le pétiole tombe, tout à fait normal, ne signifie pas que la greffe est manquée.
- Desserrer les ligatures lorsque la greffe a repris, afin d’éviter l’étranglement du porte-greffe.
Quand greffer un rosier ?
- La meilleure époque pour greffer un rosier semble être en été, de mi-juillet à septembre, période pendant laquelle la circulation de la sève se ralentit. Les rameaux choisis pour le prélèvement des écussons sont alors “aoûtés”, c’est-à-dire bien lignifiés. Les réserves nutritives, accumulées dans les cellules et en particulier dans celles des yeux, permettent au bois de passer l’hiver. Un greffage effectué à cette époque est dit “à œil dormant” : le bourgeon écussonné ne se développe qu’au printemps suivant.
- Dans les régions à climat très doux et particulièrement régulier, il est possible de greffer beaucoup plus tôt, au moment du démarrage de la végétation. L’œil se développe au cours du printemps et de l’été suivant il s’agit alors de greffe “à œil poussant”. Lorsque la greffe a pris et qu’un rameau se développe à partir de l’œil greffé, vous pouvez rabattre, c’est-à-dire couper le système aérien du porte-greffe quelques centimètres au-dessus de la greffe.
- Dans le cas d’un greffage à œil dormant, cette opération intervient au printemps suivant la date du greffage. Pour favoriser la ramification du rameau né de la greffe, pincez-le au-dessus de la deuxième ou troisième feuille, une fois les pousses bien développées.
- Les rosiers tiges se greffent de façon sensiblement identique, mais à hauteur de tige voulue. La conduite du porte-greffe doit se faire de façon à obtenir, par suppression des branches latérales, une tige parfaitement droite. Il faut greffer deux à quatre écussons, répartis autour de la tige, à même hauteur, pour obtenir dès la reprise de la greffe des sujets harmonieusement ramifiés. La même technique convient pour créer des rosiers pleureurs, en greffant sur une tige d’églantier des yeux de rosiers grimpants.
Si le greffage des rosiers doit attendre
- En attente de greffage, il faut placer les greffons en jauge, pour maintenir leur vitalité.
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